Oren Katz a découvert le quartier de Neve Tzedek en 1994 et en est tombé amoureux. « J’ai vu les belles maisons, l’architecture originale, l'atmosphère de petit village. Le charme de cette région riche d’une atmosphère particulière m’a plu et j’ai décidé d’ouvrir à Neve Tzedek une agence immobilière. Les gens pensaient que j’étais fou, parce qu’à cette époque Neve Tzedek était considéré comme un quartier à l’abandon et problématique. Mais j’ai su voir le potentiel de ce quartier. Pendant la première année j’étais à l'agence, et il ne se passait presque rien. Je passais le plus clair du temps à chercher des biens et à créer des contacts avec les habitants du quartier, des gens chaleureux. Je visitais les synagogues anciennes, et il y avait partout une ambiance conviviale de quartier qu’on ne retrouvait nul par ailleurs à tel Aviv. C’est ces habitants qui ont apporté les premiers biens à l’agence, comme un petit immeuble, l’agence était alors située rue Sharabi à Neve Tzedek ».
Très rapidement, une vague de constructions commença dans le coin. Le théâtre « Yaron Yerushalmi » a élu domicile dans le quartier, à l’instar de la troupe Bat-Sheva ; le quartier a alors commencé à se développer. En parallèle, des gens vivant à l'étranger commencèrent à s’intéresser au quartier, ils trouvaient cet endroit particulier car il leur rappelait l’Europe avec ses maisons basses et ses toits en tuiles ; la proximité de la mer, les cafés et les restaurants ainsi que des boutiques de décoration et design qui ouvraient dans le coin attiraient aussi l’attention. On a vu progressivement les ateliers de cordonniers et de couturiers avoir de nouveaux voisins : des magasins modernes, des cafés de style français, etc. Tous ces établissements émerveillaient les nouveaux résidents qui avaient alors l’impression de vivre dans un
village au cœur de la métropole ».
Quel a été votre premier projet de grande ampleur à Névé Tzedek ?
« En 1995 les propriétaires du terrain de l’association « Kol Israel Haverim » m’ont contacté, et ils m’ont confié le projet du complexe « Susan Dellal », l’association commercialisait le projet et était cofondatrice de ce dernier. À cette époque l’esplanade Susan Dellal avait été rénovée et le secteur commençait à se développer.
Est-ce que vous habitiez le quartier à cette époque ?
« Bien sûr. J’habitais le quartier pendant toutes ces années. J’ai déménagé plusieurs fois et j’habite toujours dans le quartier avec ma compagne et mes enfants. Les habitants de Neve Tzedek peuvent profiter des synagogues, du centre communautaire qui propose des activités variées aux enfants et à toute la famille, des magasins, des restaurants, du supermarché…De plus,
l’atmosphère de village qui règne à Neve Tzedek contribue au calme du quartier, les bus n’y passent pas en raison de l’étroitesse des rues et il est interdit de se garer sur les trottoirs. Et bien évidemment, les anciens comme les nouveaux habitants vivent dans l’harmonie et le respect».
La valeur des appartements a augmenté de 100%.
D’un point de vue immobilier, Neve Tzedek est un phénomène rare qui n’a pas d’égal en Israël. D’abord, le quartier a été déclaré zone à préserver, et dans ce cadre il existe un ensemble de restrictions et normes sur la construction des maisons et leur entretien qui ont pour objectif final de préserver l’architecture originale du quartier. Par exemple, il est interdit à Neve Tzedek de construire des bâtiments élevés – trois étages maximum sont autorisés. Toutes les habitations du quartier, les anciennes comme les nouvelles, doivent posséder un toit en tuile, pour maintenir l’aspect original et authentique. On ne peut pas recouvrir le bâtiment de marbre ou de pierre, est autorisé uniquement le plâtre coloré de type méditerranéen, avec des couleurs figurant dans un catalogue homologué. Les stores et volets des fenêtres doivent être en bois ou métal pour bien se marier avec le style méditerranéen si caractéristique des lieux.
Le style exceptionnel des maisons privées a attiré, comme on l’a déjà dit, de nombreuses personnes qui sont immédiatement tombées sous le charme. Grâce à ces maisons, le quartier est devenu une perle immobilière et la valeur des appartements a grimpé de plus de 100% pendant les deux dernières décennies. « En 1994, on pouvait acheter à Neve Tzedek une maison entre vingt et cent mille dollars » ; nous dit Oren Katz. « Aujourd’hui, la même maison vaut entre un et deux millions de dollars. En d’autres termes, c’est vingt fois l’ancien prix en moyenne ! Le prix des locations a aussi augmenté, et si on pouvait louer il y a vingt ans un F3 à 400 dollars, on le paiera aujourd’hui 1600 dollars, en moyenne. »
Comment expliquez-vous ces prix élevés ?
« La demande dépasse l’offre. Au niveau de la construction, il ne reste plus beaucoup de terrains disponibles à Neve Tzedek. Au début je devais convaincre les gens d’emménager dans le quartier, et ce n’était pas chose facile, tandis qu’aujourd’hui le quartier est à son maximum d’occupation, et le coin est extrêmement bien entretenu et idéal pour les familles (des jardins, des écoles, des services sociaux). Aujourd’hui je n’ai plus besoin de vendre le quartier – les clients viennent d’eux-mêmes. Mon rôle, en tant qu’agent immobilier et gérant d’une agence, c’est de trouver pour les clients le bien qui leur correspond et chercher des solutions au niveau du prix, si problème il y a. En revanche, au niveau du volume et de l’ampleur de la construction, Neve Tzedek est arrivé à un tournant, il reste très peu de place pour de nouveaux développements ou projets immobiliers. Dans le futur, la population changera, ceux qui souhaiteront habiter dans le quartier mais qui ne pourront pas faute d’habitations libres, pourront orienter leurs recherches vers des zones voisines, comme le boulevard Rothschild à l’ouest, ou près de la mer ou encore dans le secteur du souk Ha Carmel. Certains préfèrent les bâtiments luxueux construits à proximité de Neve Tzedek, à l’image de la tour Névé Tzedek côté sud, White City côté nord et Rothschild 1 à l’est ; ces constructions proposent du haut standing, avec une salle de sport, un spa, une piscine, une surveillance 24/7, un parking en sous-sol…».